L'Antre du Diable | feat Epizon & Emeline PNJ | 26.10.2021

La montagne s'étirait devant elles, aussi puissante que menaçante lorsque la nuit couvrait ses roches escarpées. Cette zone hostile était le berceau de la vengeance, du Mal et de l'agonie. Peu de voyageurs s'y attardaient, si ce n'étaient peut-être les plus courageux ou les plus fous. Ici, de sombres créatures s'exilaient pour échapper à la population citadine. Des monstres qui ne réclamaient que le sommeil et la tranquillité, dissimulés dans les hauteurs et les grottes les plus profondes mais qu'il valait mieux ne pas déranger. Aux alentours, l'atmosphère semblait calme et propice à un pique nique mais ce n'était qu'une illusion cruelle, dédiée à mordre et à piéger.

L'escale n'était pas forcément évidente pour un individu comme Epizon, maîtresse de l'eau plus que de la terre. Alors Versace coupait le rythme en faisant quelques pauses sur le chemin. Les arbres étiraient leurs bras au-dessus de leur tête pour leur offrir de l'ombre et de la fraîcheur. Après dix ans de service, la goule avait sillonné les moindres recoins qui lui seraient profitables pour élargir le territoire de l'Ordre et agir dans la plus grande discrétion toujours. Car tel était la base de son œuvre -passer inaperçue.

« Nous sommes bientôt arrivées »

Ses petits pieds foulaient la terre mouillée qui faisait dégorger toutes ses effluves salvatrices, jusqu'à parvenir à une cascade qui abritait l'entrée d'une caverne ouvrant sa gueule, prête à les avaler. Le bras droit de l'Ordre s'y immisçait, grande habituée des lieux et des protocoles de sécurité pour s'y acheminer sans risques. Si cela ne se voyait pas, un peu partout incrustés dans la pierre, des capteurs de mouvement les suivaient du regard. Tout était sombre, très sombre mais rien qui ne puisse offenser Versace, adaptée à l'obscurité. Elle se tournait vers sa compagnie, pour vérifier si elle la suivait toujours.

« C'est plus bas »

Plus bas, comme tombé dans un trou sans fond avec aucune possibilité d'en ressortir indemne. Elles s'enfonçaient alors, toujours plus, dans cette bouche béante où régnait une humidité oppressante, pour finalement se retrouver devant une porte blindée. Massive. Ses doigts se posaient dessus et tel l'enchantement prodigué, elle leur permettait d'entrer.

« Bienvenue chez toi, Epizon »

Devant Elle, l'Enfer ouvrait ses bras pour l'inviter à s'y jeter. Un Enfer, très haut de plafond, où s'offrait une Cour énorme à première vue. Des rangs de soldats étaient formés sur une dizaine de lignes inflexibles où chaque guerrier se tenait sans dépasser, la stature droite, le menton relevé, le regard fixé sur l'horizon. Elle saluait rapidement le chef d'escouade, traçant sa silhouette sur le chemin qui menait à la forteresse. Grande. Majestueuse. Terrifiante. Et en son bord, une posture qu'elle reconnaîtrait entre mille venait de faire irruption. Ses yeux d'un orange de miel, se posaient, éteintes, sur la nouvelle venue

« Tiens Lucciana. Tu tombes à point nommé, comme toujours »

Il s'agissait de sa subordonnée la plus proche. Elle l'avait ramassé dans les bidonvilles à l'âge de ses dix ans alors que des humains s'en prenaient à elle. Ce coin de la ville, aussi sale que perdu, était une véritable mine d'or pour repérer des éléments qui valaient le détour. En effet, l'Eglise Blanche ne surveillait pas du tout cette zone et tendait même à laisser traîner cette population dans la boue. Il était donc évident pour Versace de chercher des alliés en leur prêtant main forte avec toutes sortes de promesses alléchantes. Mais Lucciana lui avait immédiatement plu, plus que les autres, plus que d'en faire un pantin bien docile. Ses talents étaient intéressants. Cette femme avait le don de manipuler l'esprit des gens à sa guise, la rendant particulièrement dangereuse. La goule avait donc décidé de faire d'elle son chevalier fidèle. De toute évidence, elle lui vouait une loyauté sans failles et sans conditions. Elle lui obéissait toujours au doigt et à l'oeil mais elle avait aussi cette capacité à se faire entendre par sa supérieure en lui donnant son opinion. Son esprit était aussi affûté que le poison qu'elle pouvait injecter dans la tête des autres et cela plaisait à notre chancelière. Une capacité qui d'ailleurs, était presque similaire à celle de la créature des mers. Ce parallèle la faisait sourire intérieurement.

« Je te présente ta future collègue. Epizon, voici Lucciana. Mon chevalier fidèle » Elle n'avait aucun doute qu'elle saurait convaincre son Altesse, alors elle pouvait bien se permettre de la présenter ainsi et si la fabuleuse venait à échouer, le Bras Droit, s'entourait bien de qui elle voulait. La goule n'avait pas besoin d'approbation. L'approbation, c'était elle. Sa fidèle chancelière la détaillait quelque peu du regard, toujours digne de son mutisme profond et étourdissant. Pourtant, la vorace le sentait -sa présence lui déplaisait, autant qu'elle pouvait se méfier d'une intrusion si soudaine dans l'entourage de son maître. Alors comme pour chasser cette réaction, ses doigts se posaient délicatement sur cette joue blanche « Tout va bien Lucciana. A l'avenir, je te demanderai d'en prendre grand soin. Tu comprends ? » Sa tête se hochait lentement. Elle l'avait décelé, ce ton mi-réconfortant, mi-avertissement« Si tel est votre souhait, Madame » Elle lui souriait, satisfaite. Bien-sûr. La sorcière comprenait absolument tout. Une qualité qu'elle lui accordait prestement « Bien. Suis-moi, Epizon. Allons signer ton Destin maintenant »

Il était temps de sceller le Pacte une bonne fois pour toute et autant dire, Versace, s'en ravissait pleinement.

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Il y avait quelques petites choses à savoir sur la Maîtresse des lieux. Tout d'abord, il s'agissait d'une boule de nerf qui ne cessait jamais de s'agiter. Ses humeurs étaient comme des tempêtes qui avaleraient la moitié des montagnes si tel était son souhait. Ce qui nous amenait donc assurément sur un autre point : elle était incapable de retenir ses expressions ni même de contenir ce qu'elle ressentait. Ce qui, parfois, pouvait potentiellement poser problème tant dans sa fâcheuse tendance à s'emporter facilement au niveau de ses actes que ses décisions à prendre de façon disproportionnée. Un point qui pouvait lui porter préjudice. Mais cela faisait aussi sa carrure et sa force. Les membres de l'Ordre la craignait et ce n'était qu'un euphémisme. Tout le monde savait, ici, qu'il fallait marcher au pas dès lors qu'elle tonnait son commandement. Une cheffe de meute, au rang d'Alpha, que personne n'avait intérêt à contrarier. Toutefois, fort heureusement, elle avait encore la capacité d'écouter ses alliés ou du moins, ceux qui méritaient d'être entendus. Pour cela, elle savait pertinemment comment bien s'entourer bien que Versace y mettait toujours son grain de sel.

Versace, c'était bien cela son rôle. Le grain de sel, qui pouvait faire pencher lourdement la balance dans un sens ou dans l'autre. De manière toujours subtile, de sorte à demeurer discrète mais assez féroce pour frapper comme une ombre perfide. Et le bras droit de la faction se plaisait à ramper dans les coulisses, telle une vipère prête à injecter son poison sans même que personne ne puisse l'apercevoir ou l'attraper. Elle glissait, entre les doigts. Deux hémisphères bien différentes. L'une, la Lumière explosive et l'autre l'Obscurité sournoise.

A son arrivée, son nez s'emplissait d'une odeur très commune qui lui faisait déjà frétiller le bout de la langue. Emeline avait encore cédé à ses pulsions, pour un motif encore inconnue. Autant dire, la Matriarche était agacée. La goule espérait tout de même qu'elle soit attentive à la nouvelle venue parce qu'à bien des égards -elle comptait bien la ramener dans ses rangs. Elle se penchait donc un peu en avant, sur une maigre révérence à l'appel de son nom. Les conventions n'avaient jamais été son fort mais pour sa Supérieure, il y avait bien des codes auxquels elle ne pouvait décemment pas couper.

« Votre Altesse » nommait-elle avant de se redresser « Je me permets de vous présenter un élément fort prometteur. Nous nous sommes rencontrées il y a peu, mais j'ai immédiatement été charmée par ses capacités et surtout, son degré d'amour » Sa bouche s'étirait, ironique, à mi-chemin entre la satisfaction et les mauvais présages « Vous ne pourrez qu'être séduite » Se tournant vers elle lentement, la créature vorace déposait ensuite ses lèvres sur le front de son précieux, tout en respect « C'est à toi de chanter » puis se recula d'un pas pour laisser place à l'entretien

Elle saurait la persuader, assurément et la sirène qui parlait aux âmes allait en faire la démonstration.

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Sur un silence précieux, Versace se retirait avec élégance. Son regard s'attachait avec mutisme sur cette nouvelle rencontre, ne perdant pas un seul détail de ce qui se convertissait sous ses prunelles. Sa charmante compagnie faisait ainsi l'honneur de ses charmes pour embrasser l'âme de son Altesse. Volupté menaçante. Tendresse carnassière. Douceur coupante. C'était tout ce que lui inspirait cette créature. Tout ce qu'elle affectionnait comme d'une passion dévorante, à la frontière de l'amour et du goût du sang. Elle osait ainsi espérer que la Maitresse des lieux puisse en ressentir également l'écho.

Mais elle ne disait rien. Rien du tout. Elle observait, seulement. Ses iris brillaient d'une lueur attentive. Elle patientait sagement comme une sentinelle discrète, dans un coin de pénombre. Toutefois, sa présence n'était pas effacée pour autant. Elle était là. Elle guettait.

Elle guettait toujours, de sorte à ce que rien ne lui échappe. Que personne, ne lui échappe. L'instinct creusé dans la diffusion d'une odeur âcre et nauséeuse. La Mort, elle en était l'instrument.

La Mort guettait, tout autant que sa sentence sur le royaume entier menaçait de s'abattre telle une hache qui égorgerait une innocente chèvre en train de gambader dans les prairies vertes de cet univers. Cette herbe tendre et grasse, couverte soudain de ce liquide poisseux, opaque et rouge. La malédiction jetée, faisant gémir le chant des hirondelles pour accueillir le croassement des corbeaux. Et des cris, par-delà la cime des arbres et de l'horizon.

Alors elle attendait, le dos bien droit comme si une plaque de fer venait soutenir sa colonne vertébrale. Les doigts entrelacés sur une posture solennelle, presque religieuse. Epizon se rapprochait du but et elle la laissait faire, la couvrant toujours de cette attention particulière, aussi farouche que protectrice. Sa bouche s'étirait sur un léger sourire alors que la sirène la gratifiait de sa satisfaction. Sa tête se hochait, imperceptiblement, comme pour lui signifier son aval déjà inconditionnel.

Emeline était réceptive et son ventre picotait d'une chaleur nouvelle à cet enthousiasme.

« Je sais » répondit-elle sobrement, d'une assurance chirurgicale. Oui. Elle avait bien fait de l'amener, à croire même que l'Univers s'était aligné juste pour ce jour. Epizon était ici, dans ses rangs. A côté d'Emeline. Mais surtout.

Elle était sienne.

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