Ça va faire quoi... 20 ? 19 jours ? Que j'ai rencontré Vinur ? Une rencontre à laquelle je ne m'attendais pas du tout. Et dans le fond, cette rencontre m'a bien plus bouleversé que ce que j'ai envie de laisser croire. Vinur... Ce mec masqué qui sort de nulle part connaissait mes parents. Plus particulièrement ma mère que je n'ai jamais connue. J'ai fini du coup par connaître une partie de son histoire, qui comme je m'y attendais était plutôt triste. Tragique même au point qu'au départ, il était un peu, beaucoup réticent à vouloir me raconter. Ce gars en tout cas, ne quitte plus vraiment mes pensées, allez savoir si c'est le choc ou alors la joie ? Non vraiment aucune idée. Les sentiments étaient tellement partagés que je n'ai pas voulu en parler à ma sœur.

Quoi qu'il en soit, il fallait que je me change les idées, reste à savoir comment. Depuis la mort de mon père, je ne me suis jamais vraiment permis de me changer les idées. Complètement enfermé sur moi-même, je me suis contentée de me morfondre, de m'isoler. Mais la maintenant, j'avais envie que ça change. Car maintenant, je le sais, me comporter ainsi que fera que perpétrer la malédiction de ma famille. Il fallait que je brise ce mauvais sort de mauvaise vie de désespoir. Sinon ça ferai gagner non seulement le Pontife, mais aussi le bourreau de mes parents et ce dénommé et détestable docteur Reeves...

Non, il ne fallait pas que je les laisse gagner, je me devais rompre ce cercle vicieux et commencé à essayer d'être heureuse et de vivre une belle vie. Et pour commencer, quoi de mieux que d'essayer de passer ne serais-ce qu'une bonne soirée et... Le plus dur pour moi...

Tenter de faire de nouvelles connaissances.

Ma paranoïa me hurlait à l’oreille que c'était la pire idée qui soit. Que j'allais me faire de nouveau avoir. Que de sociabiliser de nouveau allait me faire mourir ! Et que ce n'était pas mort que j'allai rompre une quelconque malédiction ! Je me mets alors à hésiter, lèvre pincée, en fixant le sabre de mon père délicatement posé sur le coin de son mur. C’était quoi la bonne solution au juste ? Ma rencontre avec Vinur a après tout été plutôt positive ? Alors pourquoi ça ne recommencerait pas ?

Oui tout comme les trahisons peuvent recommencer aussi.

Je secoue la tête et me fixe au miroir pour réaliser que la folie s'approche, elle me guette et me donnait envie de briser ce foutu miroir. J'inspire un grand coup, me pince l'arête du nez et me répète les dires de mon père, mais aussi étrangement de Vinur. Pas-à-pas, on va tenter d'avancer pas à pas lentement et sûrement. Tu sais quoi ? On va commencer par aller au bar le plus éloigné de l'Église Blanche. On va se balader au quartier du Moyen age, tu sais ce même quartier où tu as rencontré Vinur ! Et ensuite quand tu te le sens, tu vas dans une taverne boire et coup et constater, je l'espère, avec soulagement, que rien de mal ne t'est arriver. Ok ?

Ouais ok.

J'enfile donc un manteau noir prend quand même un petite couteau en cas et sors d'un pas décidé vers le quartier du moyen age avant que je ne change subitement d'avis. Et c'était en soit, plutôt une bonne idée. L'air frais me faisait sentir vivante et à mesure que j'erre les rue de ce quartier, je sentais de moins en moins le danger me guetter. Bien, cool, on est sur la bonne voie. Aller, prochaine étape maintenant allée dans un bâtiment peuplé de gens que tu ne connais pas. Tu es armée d'un couteau, tu peux toujours te téléporter si ça dégénère... Ça va aller. Oui, ça va aller, courage.

Je repère alors la taverne ou une musique se fait entendre de l'extérieur. L'ambiance avait l'air d'être bonne, on va donc tenter le coup. J'entre et une bouffée de chaleur et d'odeur de grillade et de sueur envahit mes narines. Ma ténue était complètement hors-sujet de l'ambiance qu'a cette taverne, mais ça n'avait pas l'air de déranger qui que ce soit. Que les époques ce mélange un peu, était une norme pour Azuola après tout rien de bien étonnant. J'embrasse alors de mon regard la pièce pour repérer une place libre et tranquille. Il n'y en avait pas des masses, mais j'allais bien finir par trouver.

Sauf que voilà, à force de traîner à trouver une place en visu, complètement perdue et pas à l'aise, quelqu'un d'autre finie par entrer. Un gars complètement coloré déterminé comme jamais à faire la fête. Du moins, c'est ce qu'il faisait ressentir. Précipitamment, alors, je me décale pour le laisser entrer et le sentiment que mes efforts seront très certainement vain pour ce soir se fait sentir. Et balance alors un fuguasse.

« Pardon. »

Est-ce que je ne devrais pas plutôt rentrer chez moi ? Après tout, j'ai plutôt fait un bel effort que de me promener sans mon sabre ! Et entrer dans cette taverne est déjà en soit une victoire non ? Ouais sans doute ouais. Bon, tu passeras pour une folle si jamais tu ressors, mais il me suffira d'éviter dorénavant ce bar et puis voilà. N'est-ce pas ?

Alors qu'une culpabilité de cet échec commence à se faire sentir, j'allais donc pour partir, mais... Comment dire... Une personne était devant la porte et il faudrait que je lui parle pour qu'il se pousse.

Je vais me contenter d'attendre qu'il parte de lui-même alors ? Ouais, mais je risque d'attendre longtemps.

C'était peut-être une mauvaise idée d'être entrée ici. J'ai très certainement grillé trop d'étapes d'un coup. Sortir seule dehors le soir devrait être bien suffisant. 

Le regret instantané, non mais qu'est-ce que je croyais moi aussi hein ? Que lorsqu'une seule conversation se passe enfin plutôt bien que du jour au lendemain, je vais réussir à sociabiliser correctement ? Faire soudainement un peu plus confiance à ceux qui m'entourent sans m'imaginer qu'ils essayeront de me faire du mal ? Juste parce que Vinur a déclaré qu'il y a normalement plus de bonté que de violence ? À peine, je suis entrée dans ce bar que ces doutes et espoir se sont envolés en éclat : je vais crever, on va forcément me faire du mal, je dois vite partir en sécurité. Ça va mal se passer, j'en suis sûr. Et je ne pouvais pas avoir plus que raison ! De base, je voulais partir, mais voilà le passage vers la sortie est bloqué par la foule et un gars lumineux. Qui a entendu mes discrètes excuses pour avoir gêné le passage.

À aucun moment, je me suis imaginé que ça aurait engagé la conversation.

Quand il s'adresse à moi mes yeux s'écarquille un peu comme une biche surprise par les phares d'une voiture. Il y a eu un moment de blanc et de silence alors qu'il tendait la main pour les salutations. Je ne suis pas con, en soit serrer la main de quelqu'un n'est pas un signe de vouloir du mal. Mais voilà, l'effet de surprise, comblé à la panique, sans oublier mon incompétence à mentir... Ça ne donne pas un cocktail compatible à un serrage de main naturel. Disons que là, je suis plus en mode : au secours, je ne sais pas quoi répondre et encore moins quoi faire.

Mais le silence n'avait pas l'air de refroidir mon nouvel interlocuteur coloré. Il prend la parole de nouveau et là, j'ai totalement conscience que je ne peux pas jouer à la muette plus longtemps. Il fallait que je dise quelque chose. Dire quelque chose sans vraiment trop savoir ce qu'on veut vraiment au final. Et sans blessé la personne qui paraît amicale, et sans mentir. Bon sang, je déteste ma vie.

J'ouvre ma bouche pour en fin de compte le referme, un nœud se forme à ma gorge. Je ne me sens pas très bien, mais un conseil d'Alice ma sœur me vient en tête : arrête de faire de l'apnée quand tu paniques et respires un bon coup. C'est très certainement le moment de mettre à exécution ce conseil hors réveil d'un cauchemar. J'inspire avec le nez souffle avec la bouche et répète le mouvement une seconde fois avant de prendre enfin la parole.

« Je n'en sais rien du tout... »

Ouais, en soit c'est la vérité, je ne sais même plus si je souhaite rester ou partir. Mais au moins, j'ai réussi à être un peu plus calme. Reste à voir si je vais réussir à le rester un moment.

« Je n'ai pas vraiment... l'habitude de fréquenter des lieux avec... tant de monde si... proche. »

La seule foule que j'arrivais à faire face était le public lorsque j'étais encore une comédienne pour le roi en jaune. Machinalement, comme pour faussement me rassurer, je frotte ma poitrine qui me donne encore cette horrible sensation de brûlure ou picotement. Puis je me fais un deal dans la tête, sois je réussis a sympathiser et rester avec cet homme coloré, soit il me lâche de manière complètement légitime. Et dans ce cas-là, je rentrerai chez moi. Au pire, hein, j'aurais essayé, on ne peut pas réussir du premier coup, ça serait trop beau. Et puis dans tous les cas, il me restera toujours, Alice, Isamu et Vinur... Ce n'est pas être complètement seule ça. Ce sont des personnes de confiance...

Pas vrai ?

Tout le monde ne peut pas être aussi mauvais que le Pontife.

J'espère...

Oh bon sang et si j'étais en train de parler à un membre de l'Église Blanche ?

Oh non-pitié pas ça.

Non non non non non non non non non.